MOVICI (Modélisation de la Vigilance épistémique et de ses Institutions dans la Communication des informations partagées sur Internet)
Le projet de recherche MOVICI a pour objectif de contribuer à mieux décrire, comprendre et expliquer le rôle de la vigilance épistémique dans la communication des informations sur Internet.
Porteur de projet
Jean-Sébastien VAYRE (GREDEG)
Cheyenne Dosso (GREDEG)
Partenaires
- Jean-Sébastien VAYRE (GREDEG)
- Axe 2 MSHS Sud-Est
- Plateforme technologique COCOLAB
- Académie 3 "Réseaux, Information et Société numérique" (RISE) d'Université Côte d'Azur
Dates
2024
Sources de financement
- Académie 3 RISE "Réseaux, Information et Société Numérique"
- CSI (obtenu pour l'année 2024)
Objectifs et méthodologie
Le contexte scientifique :
Comme le montrent, en France, l’adoption et la promulgation par l’Assemblée nationale de la loi contre la manipulation de l’information, les acteurs politiques et économiques portent un intérêt particulier à la circulation des informations de mauvaise qualité dans l’espace public (Frigoli, 2023). Cet intérêt est depuis longtemps partagé par les chercheurs en sciences humaines et sociales (e.g., Knapp, 1944 ; Morin, 1969). Ces derniers ont en effet toujours accordé une attention importante aux rumeurs et à leurs fonctions sociales (cf. Scharnitzky, 2007). Aussi, dans la littérature scientifique actuelle, il existe au moins trois grandes façons de traiter la problématique de la circulation des informations de mauvaise qualité sur Internet. La première est celle que nous proposons de qualifier d’approche par la crédulité. Elle consiste à étudier comment les biais cognitifs que nous mettons en œuvre quand nous nous informons sur Internet peuvent nous conduire à adhérer à des idées douteuses voire conspirationnistes (e.g., Bronner, 2021 ; Wagner-Egger, Delouvée, Gauvrit, & Dieguez, 2018). Sur le plan politique, cette première approche peut se traduire, entre autres, par une action collective visant à censurer la production des informations étiquetées comme fausses, à renforcer la culture scientifique et l’esprit critique de la population (cf. Pasquinelli & Bronner, 2021). La deuxième est celle que nous proposons de qualifier d’approche par la vigilance épistémique. Elle complète la première en travaillant à démontrer que, si les raisonnements que nous développons ordinairement peuvent effectivement faire l’objet de biais, nous sommes tous dotés de capacités cognitives nous permettant de questionner la validité des informations qui nous sont communiquées et qui nous aident, dans la majorité des cas, à nous protéger de l’influence négative des mauvaises informations (e.g., Mercier, 2020 ; Sperber, et al., 2010). Sur le plan politique, elle peut se traduire, entre autres, par une action collective visant, d’une part, à nuancer les effets cognitifs, sociaux et économiques associés à la circulation des fausses informations afin de préserver la liberté d’expression et, d’autre part, à développer des infrastructures sociales et numériques qui renforcent la vigilance épistémique des internautes (cf. Altay, 2021). La troisième est celle que nous proposons de qualifier d’approche par le réseau sociotechnique. Par rapport aux deux précédentes, elle a selon nous l’avantage de mettre en avant comment la confiance que l’on accorde parfois aux informations de mauvaise qualité dépend de l’autorité épistémique que lui confère le réseau de relations interpersonnelles mais aussi technologique (cf. le cas des algorithmes du web) dans lequel nous nous situons (e.g., Benkler, Faris, & Roberts, 2018). Sur le plan politique, elle peut se traduire, entre autres, par une action collective visant à responsabiliser les acteurs politiques et économiques qui sont les plus médiatiques et qui « blanchissent » les informations de mauvaise qualité afin de pouvoir limiter leurs circulations sans pour autant bafouer le principe de libre expression qui est au fondement de l’esprit de l’Internet (cf. Cardon, 2010).
L'objectif du projet :
Le projet de recherche MOVICI a pour objectif d’élaborer une posture intermédiaire aux deux dernières approches susmentionnées en nous inspirant des travaux de Hugo Mercier (2020), d’Àkos Szegofi et de Christophe Heintz (2022), et de Tiffany Morisseau (cf. Morisseau, 2014 ; Morisseau, Branch, & Origgi, 2021) pour étudier comment l’utilisation individuelle et collective que nous faisons de notre vigilance épistémique dépend des interactions que nous entretenons avec notre environnement social et matériel.
Sur le plan politique, cette posture peut donc consister à croiser les finalités qui sont associées à celles que nous venons de nommer approche par la vigilance épistémique et approche par le réseau sociotechnique en nous permettant de mieux décrire et comprendre comment la circulation des informations de bonne/mauvaise qualité s’inscrit dans des configurations socioargumentatives particulières et qui sont porteuses de relations de pouvoir que nous actualisons au cours de nos conversations ordinaires.
En d’autres termes, le projet de recherche vise à modéliser le rôle de la vigilance épistémique et de ses institutions dans la communication des informations partagées sur Internet selon une double finalité :
- sur le plan fondamental, il s’agit de mieux comprendre comment la communication de ces informations renvoie à des mécanismes cognitifs et sociaux qui s’articulent étroitement les uns les autres ;
- sur le plan appliqué, il s’agit de mieux comprendre comment il est possible de limiter la circulation des informations de mauvaise qualité mais, aussi et surtout, d’encourager celle des informations de bonne qualité en concevant des infrastructures sociomatérielles qui favorisent le bon développement des institutions de la vigilance épistémique.
- Axe 1. Construction du cadre théorique et élaboration des hypothèses de recherche
- Axe 2. Conception et passation du protocole expérimental
Actualités, évènements
Un calendrier prévisionnel a été établi.
Le projet a déjà commencé. Il est soutenu par un financement de l'Académie d'Excellence RISE "Réseaux, Information et Société Numérique" de l'IDEX UCAJEDI, qui a permis notamment le recrutement d’une post-doctorante compétente en sciences informatiques mais aussi en sciences cognitives et/ou en sciences sociales, ainsi que l'achat de 2 oculomètres.
Image ci-dessous :